Les voyages immobiles… … de Martine Madelaine-Richard

17 mars 2024

L’or du mimosa

Pour l’Herbier de poésie ICI    Adamante, ICI, nous propose d’écrire sur une de mes photos

Que d’or! Cette année mon mimosa est extraordinaire. Quelle abondance! Quelle générosité éblouissante!

J’imagine un  Harpagon minuscule dans mon jardin. Un Tom Pouce  avare désirant s’accaparer et retenir le monceau d’écus du magnifique acacia* . Les yeux fermés, le nez enfoui au cœur des belles glomérules dorées, le voici sourd au monde.

« Posséder sans jouir n’est rien. »* *

Le petit personnage, bien que doté d’’invisibilité à nos yeux, attend la nuit pour sortir et s’emplir les poches de ces sequins duveteux et parfumés.  Jamais rassasié, il en prend à poignées, encore et encore. Pourtant, rapidement, ses poches se révèlent trop petites. Alors, l’avorton revient avec un sac presque aussi grand que lui. Et il amasse, amasse ce trésor, un sourire béat fendant sa face d’une oreille à l’autre.

Un escargot glisse nonchalamment à deux pas de là, s’arrête pour examiner, tendant une corne après l’autre, l’étrange comportement du farfadet.

–  Holà l’homme! Que fais-tu? Pourquoi tant de hâte? s’informe le gastéropode.

Surpris, le gringalet lève la tête, cherchant qui peut bien l’espionner.  Et peut-être le voler? Il y a tant de malhonnêtes de nos jours!

– Qui va là? s’écrie-t-il.

– Ce n’est que moi, Hélix. J’habite ici, au pied de ce gratte-ciel. Je ne fais que passer entre deux repas rafraîchissants.

– Que me voulez-vous? réplique le myrmidon corseté d’anxiété.

– Moi? Je ne veux rien que de la tranquillité. Votre agitation gêne ma digestion. Que faites-vous? insiste le colimaçon.

– Heu… Je nettoie le sol. Le vent et la pluie ont arraché et jeté bas des milliers de… heu… boules jaunes. Ça fait désordre. Alors… heu… voilà, conclue-t-il, embarrassé.

– Ah bon? Et bien, je vous laisse à votre labeur, répond la cagouille, reprenant sa glissade interrompue.

La demi-portion s’active éperdument pour en terminer avec sa précieuse récolte, et, surtout, la mettre à l’abri.

giboulées de mars-

le soleil du mimosa

tapis d’or fugace

 

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MMR ( tous droits réservés

* L’arbre appelé mimosa, originaire d’Australie, est un acacia. Ne pas confondre avec le faux acacia aux belles grappes de fleurs blanches dont le vrai nom est robinier.

* * Réplique de l’avare dans la pièce  de théâtre de Molière.

3 mars 2024

Balade océane

Pour l’Herbier de poésie, ICI  Adamante, ICI, nous propose d’écrire sur une photo de Jeanne FADOSI

 

C’est une matinée de septembre où le soleil éclabousse toute la région d’une multitude de gouttes d’or. Ces dernières s’entremêlent merveilleusement à celles iodées de l’eau de mer.

Nous sommes dans un maison forestière nichée au cœur de deux hectares de pinède, à une soixante de mètres de la plage du Bassin d’Arcachon. Il est tôt. Sa Majesté Phébus n’a pas encore vaporisé la rosée de la nuit.  Les notes parfumées des arbres, du varech, de l’humus, des fleurs sauvages viennent s’enrouler autour de moi, me soufflant:  » Viens… viens… »

Près du portillon, accroché au grillage, un pied de clématite frémit de toutes ces petites graines plumeuses. Mots inaudibles qui viennent soutenir l’invitation sylvestre. Il n’en faut pas plus pour m’entraîner sur le tapis épais des aiguilles de pins.

Entre les jeux de l’ombre et de la lumière apparaissent et disparaissent tour à tour, l’éclat fuchsia des bruyères, le vert acide des fougères derniers nées. Majoritaires, leurs ainées montrent les signes avant coureur de l’automne. Ici, son pinceau combine un jaune vif à un vert profond. Là, elle panache orange et roux. Ailleurs, elle s’emballe saupoudrant toutes les frondes de bruns profonds. Plus je m’enfonce dans la forêt, plus les odeurs me capturent, m’envoûtent. Celle des champignons rivalise avec les fragrances fraîches des mousses que ma flânerie écrase. La montée de la chaleur anime le sous-bois. Les sifflets et vocalises répondent aux Kraaa! Kraaaa! de trois corneilles résidentes à l’année. De nombreux butineurs s’entrecroisent autour de petites fleurs blanches inconnues, aux lèvres jaune pâle des tubes d’un groupe d’anonymes, près des chapeaux meurtris des russules, cèpes de pins et autre champions divers.  A foison, des arbousiers offrent généreusement clochettes affriolantes et fruits gorgés de sucre à une foule d’amateurs :bourdons, abeilles, mouches, oiseaux… Quelques ronciers ici et là protègent leurs baies noires d’une armée d’épines acérées. Un peu plus loin de profonds boutis* trahissent la quête insatiable des sangliers friands de vers et autres larves. Soudain, un écureuil m’apostrophe, tout fouettant l’air de son superbe panache. D’accord. Je dérange. Il est temps de faire demi-tour.

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Appel de la sylve-

Mouettes, merles, mésanges…

La joie pour compagne

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MMR ( tous droits réservés)

* boutis: le sanglier retourne le sol avec ses défenses et le boutoir (la partie supérieure de son groin). Il peut labourerce dernier jusqu’à  60 cm de profondeur. Son super odorat le guide vers « d’excellents repas ».

11 février 2024

Volcanique!

Filed under: entre ombre et lumière — Étiquettes : , , , , , , , , , — Martine @ 6 h 09 min

Les humeurs singulières du soleil sur la montagne Alaric.  Des aurores jamais semblables, toujours surprenantes, ébouriffantes, fabuleuses, sidérantes, envoûtantes, fantastiques…

Prélude fantasque-

Fumerolles carmin des

nuages au levant

Au seuil du jour

Flot de lave

Impétueux

Sur l’Alaric*

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Courant rapide

De désirs feu

Nageant, plongeant

Leur or natif.

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MMR ( tous droits réservés)

 

* L’Alaric: https://fr.wikipedia.org/wiki/Montagne_d%27Alaric

Merci pour tous vos commentaires qui font tant plaisir. C’est si motivant! 🙂

7 janvier 2024

Aurore en or

Ébauche du jour-

Une lève-tôt pagaie

L’eau salée orange.

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Aquarelle mandarine

La pastelliste salue

L’artiste solaire

Au seuil semé d’or fin

D’un jour riche en promesses

Une mouette pêche

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MMR (tous droits réservés)

Merci à toutes et à tous pour vos commentaires, vos partages de souvenirs, d’anecdotes…  que je lis toujours avec grand plaisir. C’est si enrichissant! Sans eux, ce blog serait fermé depuis longtemps.

19 mars 2023

D’un ajonc à l’autre

Pour l’Herbier de poésies, ICI , Adamante, nous propose d’écrire sur une photo de Balaline, ICI

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Le soleil, cet or brûlant les yeux à l’imprudent qui le fixe. Cette belle couleur jaune a la puissance de la passion flamboyante. Une teinte que l’on rencontre partout. On en  use, on en abuse avec une prodigalité vorace. Laissons de côté la négativité ( car hélas elle existe aussi) pour ne raconter que la positive: des rideaux velours moutarde dans ma salle de séjour, en passant par mon gros pull safran si confortable, en continuant avec un plat au curry indien dont la chaude nuance  suffit à me faire saliver. Il existe une infinie variétés de cette couleur autour de nous. Avec le printemps, les premiers pissenlits s’épanouissent alors que les mimosas vont bientôt tirer leur révérence. Hier, la pluie s’était invitée dans mon coin du sud.

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Mars-

Il fait un temps merveilleux

Plusieurs fois par jour

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Pour les incas, l’or, c’était « la sueur du soleil ».  Pour moi, l’or de certaines fleurs a le don de me faire voyager au pays des souvenirs. L’algelàs, ou ajonc de Provence,( nommé argeras en pays d’Aix)  me ramène à mes belles balades sur les flancs de la Sainte Victoire. Mais son cousin l’ajonc d’Europe , qui m’a plus d’une fois piquée de ses dards, éclaire le chemin de maintes promenades familiales en forêt landaise. Ou, pour la plus récente, en solitaire, sur la presqu’île du Cap-Ferret*

Hélichryses, genêts, ajoncs… Sous le feu de Phébus, leurs parfums entêtants se mêlent à celui de la térébenthine exhalée par les pins.

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 Voyage-

Du printemps à l’automne

Mon nez pour gouvernail

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MMR ( tous droits réservés)

*balade racontée précédemment sur mon blog à l’aller:  ICI  et le retour: ICI

10 octobre 2021

Au château des rêves suaves

Filed under: l'herbier de poésie — Étiquettes : , , , — Martine @ 0 h 42 min

Pour l’Herbier de poésies, Adamante, ICI , nous propose d’écrire à partir de son dessin ci-dessous tiré de son dernier recueil: ICI

 

Il est un château complètement inconnu. Vaste, doré à l’or solaire, sa beauté éblouissante le dissimule parfaitement aux regards des hommes. Pourtant, de multiples pièces ouvertes sur l’azur ou le velours nocturne peuvent accueillir une multitude de visiteurs.

 

Écho endormi

Entre des tours crénelées-

Bulle mystérieuse

 

Mais cet étrange castel est une destination fort appréciée par… les animaux. Chevaux, chats, chiens, biches, etc… Tout le monde cohabite sans problème. Ni faim, ni soif, ni bobos. Ici, la magie règne en maitresse.

 

Douce éternité-

Au royaume enchanté

L’amour en partage

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MMR ( tous droits réservés)

Gros dodo des loutres ci-dessous 🙂

 

15 août 2021

Ballon tango

Filed under: Poèmes — Étiquettes : , , , , , , , , , — Martine @ 4 h 52 min

Roule boule orange

Bilboquet fougueux

Aux mains d’août riant

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Tourne ballon tango

Suis le rythme haletant

De deux cœurs amoureux

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Volte écu pourpré

Sur le pavement or

D’un nouveau jour heureux.

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MMR ( tous droits réservés)

6 juin 2021

Doré comme…

Lever doré. Phébus sort nonchalamment de sa couette nuageuse.  Il promène sur le monde un regard incandescent, insoutenable. Mais paradoxalement, ce que ce feu fait du bien.  L’or solaire coule, ruisselle, allume des reflets mordorés sur ma peau, sur l’eau du Bassin. Richesse d’un instant proche de la perfection.

 

 

 

 

 

 

 

 

Cette couleur si précieuse, d’autres ont décidé de la « chiper » à l’astre du jour.  Je la retrouve aux pétales d’un sedum, d’un pissenlit, d’une giroflée. Mais également sur la somptueuse tenue de gala d’une minusculee araignée saltique; sur le corset d’un syrphe * ou d’une  toute petite abeille sauvage.**

Les jours où le mauvais temps s’éternise, cette teinte fait tant rêver à l’été.  Je lui cherche des synonymes qui roulent sur la langue comme autant de bonbons: ambré, blond, fauve, cuivré, vermeil, safran… Le vent agite les jaunets de mes tomates poires. Or sucré, juteux, si frais: une vraie gourmandise!

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MMR ( tous droits réservés)

* syrphe: mouche appartenant à l’ordre des diptères

** peut-être une halicte?

28 mars 2021

Printemps!

Filed under: animaux, insectes...,au Jardin: fleurs, arbres... — Étiquettes : , , , , , , , , , — Martine @ 6 h 14 min

Capricieux! Inconstant! Éblouissant! Ce ne sont pas les adjectifs qui manquent lorsque l’on veut parler de toi Printemps!

Pour fêter ton réveil, le 20 mars, la Météo avait commandé le soleil. Phébus, tout sourire, se plia en quatre pour faire plaisir. Il cerna d’étincelles le safran des narcisses; coula au bronze  l’or des forsythias; ébouriffa le miel des pissenlits; réveilla coucous et primevères; satina alysses et tulipes d’une chaleur bonne enfant…

Rien n’était trop beau pour toi. Le ciel, balayé de frais, devint un somptueux tapis floral: myosotis, lin, scabieuse, jacinthe, pervenche, céanothe, crocus, agapanthe… Mille nuances de bleu composèrent un tableau changeant à rendre jaloux Océan.

Infime, dans un coin d’horizon perdu, une peluche neigeuse flottait paresseusement. Ultime trace de l’oiseau tempête chassé à grands coups de rayons brûlants.

Nul ne devait assombrir  ta venue.

Tout devait être parfait.  Les fleurs offrirent le meilleur de leurs mots parfumés à la gloire de ce jour. Les oiseaux. Ah les oiseaux!  Ces petites boules de plumes  devinrent lyriques. Leurs notes amoureuses s’envolèrent à la conquête des cœurs.

En dansant sur le vent, sur ses voltes fantasques, abeilles, bourdons, mouches, papillons et autres coléoptères, célébrèrent Aphrodite, déesse de l’amour.

Même l’assommant chien d’à côté se fit un peu plus discret. Un ange poilu, museau pointu et longues oreilles, avait dû le toucher de ses ailes apaisantes. Quiétude, légèreté et joie étaient au menu de cette renaissance.

Par Vertumne,  dieu des jardins et des potagers, une envie irrépressible s’empara de moi; celle de plonger mes mains dans la terre; de nettoyer, tailler, désherber, semer, transplanter. Je me mis à féliciter  les abeilles, ces vaillantes petites ouvrières qui se dépensent sans compter.  Puis mes louanges allèrent aux  radis et à la salade à couper  prospérant résolument dans un des carrés potagers en dépit des gelées récentes. Sans oublier le talent d’imitateur du sansonnet s’époumonant, infatigable, au bord du toit. Tout à coup je me surpris à sourire pour rien, comme ça, dans le vide. Folie printanière?

Suave et ensorcelant Printemps. Quel bonheur que ton retour!

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MMR ( tous droits réservés)

31 janvier 2021

P’tit Chêne

Filed under: l'herbier de poésie — Étiquettes : , , , , , , , , , , , — Martine @ 4 h 53 min

Pour l’Herbier de poésies, Adamante, ICI, nous propose d’écrire sur une de ses photos personnelles  : L’arbre creusois

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Il est un lieu, loin, très loin, où pousse une petite forêt. Parler de forêt est peut-être excessif  car les gens du coin la nomment « Le bois sans nom ». Pour y parvenir il faut traverser prairies, ruisseaux et marécages; des ronciers imposants; une mêlée inextricable d’ herbes hautes et d’arbustes exubérants.

D’hiver à l’automne

Sur la carte routière

Une tache verte

Cette sylve, si difficile d’accès, est préservée des hommes et de leurs cognées; des voitures 4X4 et du hurlement des motos tout terrain.

L’ombre des arbres

Leur noirceur si effrayante

Chape de silence

Mais, ce n’est qu’une apparence, un leurre de Gaïa. Car, derrière ce rideau inquiétant, tout un monde saute, court ou rampe. Le lapin d’Alice secoue  sa montre gousset  en se lamentant bruyamment: « En retard! Je suis en retard! ». Alice aussi est en retard… d’une histoire. Deux gros escargots unissent leurs destins tandis que le concert des grillons couvre leurs ébats. Bambi parle à une pervenche au bleu irréel. Et l’ours Baloo  compose une berceuse pour Mowgli. C’est un autre monde où le merveilleux règne en maître.  Où les arbres ont le don de parole. Tenez, justement, j’en vois un qui se penche pour mieux écouter la chanson de la vie.

Harmonie dorée-

La ronde des champignons

Celle des mouches

P’tit Chêne à la voix flûtée

Se joint au merle siffleur

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MMR ( tous droits réservés)

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